Commémoration du 11 novembre 2024 à Bagnols-sur-Cèze : entre mémoire et appel à l’action
« C’était il y a 106 ans, en 1918. À la 11ème heure du 11ème jour du 11ème mois, de la boue des Flandres à la frontière suisse, les clairons égrènent les notes du “cessez-le-feu”. Aux fiertés de la victoire se mêle le cortège d’ombres des “péris en terre”, accompagné de ceux qui les pleurent. Ce sont ces sacrifices que nous commémorons aujourd’hui, auxquels sont agrégés depuis 2012 celui de tous les “morts pour la France” ». C’est par ces mots que le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, a introduit le message national lors de la commémoration du 11 novembre, rappelant le lourd tribut payé par les soldats de 1914-1918. À Bagnols-sur-Cèze, la cérémonie a rassemblé une foule nombreuse, unie dans le recueillement au pied du monument aux morts.
Le discours du ministre Lecornu, lu par Christian Baume lors de la cérémonie, a résonné avec gravité et solennité. « Honorer leur mémoire, c’est écouter ce qu’ils nous disent encore aujourd’hui », a-t-il insisté, en appelant au « devoir de gratitude, de lucidité et d’espérance ». Gratitude pour le sacrifice des jeunes hommes tombés, souvent anonymement, sur les champs de bataille. « Leur vie, c’était marcher, marcher encore, marcher quand même à demi-mort de fatigue… », a cité le ministre en reprenant les mots du général de Castelnau, pour souligner l’abnégation des « Poilus ». Le ministre a aussi rappelé la nécessité de rester vigilant face aux menaces contemporaines, en écho à l’Histoire qui, malgré l’Armistice de 1918, a vu se profiler de nouvelles guerres. « Le devoir de lucidité, c’est de ne pas oublier… », a-t-il martelé.
Après le dépôt de gerbes, le cortège s’est dirigé vers le square Thome, où les noms des 168 soldats bagnolais morts pendant la Grande Guerre sont gravés. Jean-Claude Mougenot, président des médaillés militaires, a pris la parole pour honorer la mémoire des disparus et rappeler les souffrances traversées par la France durant la guerre. Lors de son allocution, Jean-Claude Mougenot a mis un point d’honneur à rappeler la portée inestimable du souvenir collectif en ce 11 novembre. « En ce jour, nous nous rassemblons pour honorer la mémoire de ceux qui ont, au prix de leur vie, défendu les valeurs de la France et protégé la nation contre l’injustice et la tyrannie », a-t-il déclaré solennellement. Il a pris soin d’insister sur le poids du sacrifice consenti par des milliers de soldats, qui ont quitté leurs familles, leurs terres et leurs rêves pour affronter l’horreur des tranchées, souvent sans retour. « Leur courage, leur abnégation et leur fidélité aux idéaux de la République doivent être, pour nous tous, une source perpétuelle d’inspiration », a-t-il ajouté. Jean-Claude Mougenot a également rappelé que chaque nom gravé sur les monuments aux morts est porteur d’une histoire individuelle, d’un drame familial, d’une douleur incommensurable qui s’est prolongée bien au-delà de la fin du conflit. Il a invité les plus jeunes à ne pas oublier, à s’instruire et à s’approprier cette mémoire, pour que jamais la tragédie de la Grande Guerre ne soit réitérée. Pour lui, le devoir de mémoire n’est pas un simple exercice de commémoration, mais un engagement à défendre les idéaux de liberté et de paix face aux menaces contemporaines, qu’elles soient visibles ou insidieuses. En conclusion, il a rappelé que la vigilance et l’unité étaient les meilleurs garants de la préservation des acquis si chèrement obtenus.
Jean-Yves Chapelet a prononcé un discours dans lequel, il a tenu à rappeler que ce moment de recueillement ne peut se réduire à un acte symbolique, une gerbe déposée et des regards baissés par habitude. « Ce jour nous impose de réfléchir à ce que nous devons aux femmes et aux hommes qui, hier, ont sacrifié leur vie pour la liberté, pour un monde plus juste et pour la paix », a-t-il déclaré avec force. Il a interrogé le public : sommes-nous réellement dignes de leur mémoire ? Cette question, loin d’être rhétorique, pointe du doigt les défis actuels auxquels notre société fait face : montée du populisme, divisions grandissantes, érosion de la solidarité et repli sur soi.
Jean-Yves Chapelet a souligné avec inquiétude l’émergence d’idéologies qui menacent les fondations mêmes de la démocratie, prônant des solutions simplistes et dangereuses. « Nous vivons dans un monde où certains préfèrent élever des murs plutôt que de tendre la main, où la haine et la peur cherchent à prendre racine. Mais le repli et la fermeture n’ont jamais conduit qu’à la division et au conflit. » Pour lui, le message du 11 novembre ne se résume pas à un regard tourné vers le passé : il est un appel pressant à agir aujourd’hui pour préserver la paix, à construire un avenir où la fraternité prime sur la haine.
En prenant l’exemple des élus de Bagnols qui se sont rendus récemment à Carcaixent, en Espagne, pour porter secours et espoir aux victimes des inondations, Jean-Yves Chapelet a illustré son propos : « La solidarité n’est pas un mot, c’est un acte, un engagement concret pour aider l’autre, même au-delà des frontières. » Il a exhorté chacun à voir en l’Europe non pas un projet lointain, réservé à une élite technocratique, mais un idéal commun, humain, à défendre avec audace et détermination. « Cette Europe, que nous devons bâtir ensemble, ne sera forte que si elle repose sur la solidarité et sur la volonté de faire face, unis, aux défis de notre époque : crises climatiques, exodes, fractures sociales. Aucun pays, seul, ne pourra relever ces défis. »
Jean-Yves Chapelet a conclu son discours en rendant hommage aux générations passées, celles qui ont affronté la boue et l’horreur des tranchées pour que la paix devienne une réalité. Il a évoqué les symboles de cette époque, notamment les « poilus », dont la résilience et le courage doivent inspirer notre action quotidienne. « C’est ce même esprit de sacrifice, de courage et de solidarité que nous devons raviver aujourd’hui. Ne soyons pas les spectateurs passifs de l’Histoire ; soyons les bâtisseurs d’une Europe forte, solidaire, digne du sacrifice de nos aînés. » Par ces mots, il a lancé un appel à l’action collective, à la vigilance et à l’unité, rappelant que la mémoire ne doit jamais se dissocier de l’engagement à œuvrer pour un avenir meilleur.
La députée Pascale Bordes a également salué l’engagement des porte-drapeaux, qui, par tous les temps, accomplissent le devoir de mémoire. Leur présence rappelle à chacun que le passé ne doit jamais être oublié, et que c’est à travers ces gestes de transmission que la flamme du souvenir demeure vivante.
Cette commémoration du 11 novembre 2024 à Bagnols-sur-Cèze, ancrée dans la mémoire collective, a été marquée par la gravité des discours, mais aussi par un appel fort à regarder vers l’avenir avec courage et détermination. Que vive la République. Et vive la France.