Redevance incitative : un débat animé sur son efficacité et la limitation des accès aux déchèteries

La mise en place de la redevance incitative (RI) pour la gestion des déchets continue de susciter de vifs débats, un an et demi après son lancement au sein de l’Agglomération du Gard rhodanien. Lors d’une récente séance du conseil communautaire, élus et vice-présidents ont longuement débattu sur ses bienfaits, ses limites et sur une mesure à venir : la restriction du nombre de passages quotidiens en déchèterie pour les particuliers.
Une mesure jugée « injuste » par certains élus
Le conseiller Rassemblement National et député de la 4ème circonscription Pierre Meurin a ouvertement critiqué le dispositif, qu’il a qualifié « d’usine à gaz technocratique » et « d’injuste ». Selon lui, la RI souffre d’un problème démocratique :
« À Pont-Saint-Esprit, la deuxième commune de l’agglomération, elle fait l’unanimité contre elle. Dans la rue, c’est un sujet permanent », a-t-il affirmé, estimant que les habitants rejetaient massivement ce mode de tarification.
Une défense ferme de la majorité
Face à ces critiques, Laurent Nadal, vice-président en charge des déchets, a rappelé que la RI était avant tout un choix pragmatique face à la flambée des coûts :
« Si nous étions restés à la taxe d’enlèvement des ordures ménagères, il aurait fallu l’augmenter de 30 % : 20 % pour le traitement et 8 % pour l’inflation. La RI a permis non seulement d’éviter cette hausse, mais aussi de baisser la taxe à Pont-Saint-Esprit. »
Il a insisté sur le fait que la facturation au nombre de levées ou à la taille du bac était plus « juste » : chacun paie selon la quantité de déchets qu’il produit.
L’élu a également rappelé que le système était encore jeune – mis en place officiellement depuis janvier 2024 – et que des ajustements étaient en cours pour résoudre les difficultés, notamment dans les centres-villes et les logements collectifs.
Le sujet sensible des déchèteries
Le débat s’est aussi focalisé sur l’accès aux déchèteries, qui sera bientôt limité. Plusieurs élus ont relayé les inquiétudes d’habitants contraints par leur emploi du temps :
- Brigitte Vandemeulebroucke (Carsan) a évoqué la perspective d’un accès limité à un passage par jour, insuffisant selon elle : « Pour les collectes d’encombrants, un seul camion municipal ne peut pas se contenter d’un passage unique. »
- Marjorie Sabaton (Saint Paul les Fonts) a demandé davantage de souplesse : « Ceux qui travaillent n’ont que le samedi pour aller à la déchèterie. Limiter à un passage par jour, c’est contraindre les familles à stocker leurs déchets chez elles. »
Laurent Nadal a reconnu la nécessité de trouver un équilibre : « Il y a des abus, certains passent leurs journées dans les déchèteries. Mais nous travaillons à un système de badges permettant de comptabiliser les entrées, avec une certaine flexibilité. »
Des expériences locales contrastées
Alexandre Pissas, maire de Tresques, a rappelé que malgré les difficultés, la RI restait « la moins mauvaise des solutions » :
« Pour ma propre famille, c’est parfois contraignant, mais les avantages l’emportent sur les inconvénients. »
À Pont-Saint-Esprit, Valère Segal a souligné que la situation s’améliorait après un démarrage difficile : attribution de sacs noirs de plus petite taille, augmentation de la fréquence de collecte, expérimentations locales.
De son côté, Gérald Missour, maire de Saint-Nazaire, a élargi le débat en rappelant l’enjeu mondial :
« En Indonésie ou ailleurs, des mafias prospèrent sur l’exportation de nos déchets. Avec la redevance incitative, nous assurons la traçabilité et évitons de contribuer à ce système. »
Entre pédagogie et ajustements
La majorité des élus reconnaissent que la communication autour du dispositif a souffert du Covid-19, retardant l’acceptation de la réforme. Mais tous s’accordent sur un point : la RI ne se limite pas aux bacs noirs. Elle englobe aussi la gestion des déchèteries, du tri sélectif, des vêtements, du papier ou encore des encombrants.
Si la redevance incitative ne fait pas l’unanimité, ses défenseurs assurent qu’elle protège le pouvoir d’achat et prépare l’avenir, à condition de corriger ses défauts. Quant à la limitation des passages en déchèterie, elle reste en discussion et pourrait être modulée pour ne pas pénaliser les usagers réguliers.



